Détachement d’office en cas d’externalisation : Infos droits CGT

Détachement d’office en cas d’externalisation : Infos droits CGT

Détachement d’office : Un danger pour les agents et les services publics

Le détachement d’office de fonctionnaire vers des services externalisés est désormais possible sans qu’il puisse juridiquement s’y opposer depuis un décret publié le 11 juin 2020.
C’est l’un des points particulièrement néfastes de la Loi de transformation de la fonction publique qui se concrétise. Un décret scélérat qui vise non seulement à contraindre les agents à suivre leurs missions lorsqu’elles sont externalisées, mais aussi à perdre leur statut de fonctionnaire pour basculer en CDI de droit privé…

L’objectif de ce texte est clairement de faciliter les externalisations / privatisations et donc la casse des services publics.

Pour résister à ce texte régressif pour les fonctionnaires, il est important de le connaître pour mieux le combattre…

Les contractuels : Un cadre légal déjà fragile…

Pour mémoire, s’agissant des agents contractuels, la situation était déjà catastrophique puisqu’ils pouvaient déjà être transférés d’office en cas d’externalisation.
En ce cas, l’organisme d’accueil est tenu de leur proposer un contrat de droit privé reprenant les clauses substantielles du contrat de droit public qui était en vigueur. Le refus de l’agent de suivre le transfert contraint entraîne son licenciement. Le texte de référence est l’article L1224-3-1 du code du travail.

C’est la situation que nous avons déjà connu pour les externalisations subies au CD 78…
La loi n’étant pas de notre côté nous avions alors dû engager d’âpres négociations sur fond de mobilisation du personnel lors des transfert à l’EPI 78-92 ou à C’Midy.
Ces luttes menées n’ont pas empêché les externalisations mais au moins, elles ont permis de maintenir les agents impactés dans l’emploi et d’obtenir un CDI…

Les stagiaires : Entre deux chaises…

Le fonctionnaire stagiaire est nommé pour occuper les fonctions liées à un emploi du grade où il a vocation à être titularisé, il ne peut donc faire l’objet d’un détachement d’office.
Les agents en cours de stage au moment du transfert du service ou de l’activité pourront être embauchés par le délégataire par contrat de droit privé si ce dernier en fait la proposition, ou être licenciés…
Le stagiaire ne bénéficie pas d’un droit à être reclassé dans un autre emploi (CE, 5 octobre 2016, n°386802). Lorsqu’il est mis fin au stage par l’autorité territoriale en raison de la suppression de l’emploi ou pour tout autre cause ne tenant pas à la manière de servir, le stagiaire est, à sa demande, réinscrit de droit sur la liste d’aptitude (article 44 de la loi du 26 janvier
1984 susvisée). Dans tous les cas, l’agent perd le bénéfice de la période de stage accomplie auprès de l’employeur initial.

Les fonctionnaires : Un cadre légal fragilisé…

Avec ce décret, un fonctionnaire employé dans un service public dont la gestion est confiée à une entreprise peut désormais être détaché dans celle-ci, sans qu’il ne puisse juridiquement s’y opposer…

Présentation du dispositif en quelques mots :

Le fonctionnaire est détaché d’office pendant la durée du contrat liant l’administration à l’organisme privé sur un CDI.
L’organisme externalisé d’accueil est tenu de maintenir au moins un niveau de rémunération correspondant à la rémunération brute perçue par le fonctionnaire (à l’exclusion des IHTS) au titre des 12 derniers mois précédant la date de début de son détachement. Nombres d’autres points deviennent incertains et dépendent de l’organisme d’accueil (formation, condition de travail, horaires, implantation géographique, prestations sociales, médecine préventive…)
L’agent peut toujours demander à ne pas être détaché d’office ou à mettre fin à son détachement pour réintégrer un emploi correspondant à son grade au sein de sa collectivité d’origine, mais ce n’est plus de droit. L’autorité territoriale est seule décisionnelle.
À tout moment pendant la durée de son détachement, le fonctionnaire peut également demander sa radiation des cadres et le versent d’une indemnité. Cela entraîne de fait la perte du statut de fonctionnaire… Le détachement d’office porte donc bien son nom…

En cas de renouvellement du contrat liant l’administration à l’organisme privé, le détachement du fonctionnaire est renouvelé d’office.
Si l’administration conclut un nouveau contrat avec un nouvel organisme privé, le fonctionnaire est à nouveau détaché d’office auprès du nouvel organisme privé d’accueil.

Pour plus d’information sur le dispositif, nous renvoyons à l’Art. 76 de la loi dite de transformation de la fonction publique et au Décret no 2020-714 du 11 juin 2020 relatif au détachement d’office.

Des leviers de résistances :

Des moyens juridiques d’agir existent si la procédure n’est pas respectée (respect des délais, avis du Comité Technique, information de l’agent, niveau de rémunération, correspondance de missions etc…).
En outre, le Conseil constitutionnel précise que le détachement d’office ne peut intervenir que si l’organisme d’accueil l’a accepté dans le cadre du contrat d’externalisation (Conseil constitutionnel n° 2019-790 DC du 1er août 2019).

Par ailleurs, seuls les fonctionnaires à temps plein sur les missions transférées peuvent être détachés d’office : la procédure n’est donc pas applicable aux fonctionnaires dont l’activité n’est que partiellement transférée.

Enfin, ce dispositif est facultatif. L’autorité territorial peut donc tout à fait décider de ne pas y avoir recours et de laisser libre choix à un agent impacté de suivre le transfert des missions ou d’être réintégré sur un autre poste correspondant à son grade. L’autorité territoriale peut également définir le périmètre des emplois inclus dans le transfert et donc étendre ou limiter le nombre d’agents qui seraient concernés par un détachement d’office dans le cadre d’une externalisation.
Ce caractère facultatif laisse donc libre cours à toutes négociations avec les représentants du personnel… l’impact financier pour la collectivité est l’un des points d’appui car il incomberait à sa charge le versement d’éventuelles Allocation de Retour à l’Emploi (ARE) et/ou indemnités, ainsi que la gestion des fonctionnaires en congé parental ou en disponibilité au moment de l’opération de transfert du service. Nous rappelons par exemple, qu’à l’expiration du congé parental, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans la
collectivité d’origine (article 75 de la loi du 26 janvier 1984).

…Et l’expérience montre que le niveau de négociation est souvent étroitement lié à d’éventuelles actions collectives, c’est tout particulièrement le cas lors d’externalisation…
Il conviendrait dès lors d’échanger collectivement sur le contexte, les enjeux, les objectifs et les moyens d’actions… et de s’organiser collectivement pour faire entendre les demandes du personnel et défendre notre statut comme pierre fondatrice du service public….

Nous appelons à la plus grande vigilance face au détachement d’office, et à s’organiser collectivement en résistance à toute mise en oeuvre de ce dispositif…

Références juridiques :
Art. 76 de la loi dite de transformation de la fonction publique
Décret no 2020-714 du 11 juin 2020 relatif au détachement d’office

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